Le blogue reconnu comme la référence par la communauté juridique et d’affaires pour le droit immobilier
Vices cachés : 10 choses à retenir

Vices cachés : 10 choses à retenir

Écrit par Me Manuel St-Aubin
Imprimer cet article

Si un immeuble a été vendu avec la garantie légale de qualité, cette garantie protège notamment l’acheteur contre les vices cachés. Quoi faire si des vices cachés son découverts? Voici 10 choses essentielles à retenir si vous faites face à cette situation.

Écrit par : Me Manuel St-Aubin, avocat associé chez St-Aubin avocats

1. La vente doit avoir été faite avec la garantie légale de qualité

Le recours pour vices cachés en vertu de la garantie de qualité découle notamment de l’article 1726 du Code civil du Québec (C.c.Q.). Cette garantie existe généralement de plein droit[1], et elle peut être bonifiée ou diminuée dans l’acte de vente[2]. Autrement dit, si l'acte de vente est silencieux quant à l'existance de la garantie légale, celle-ci sera incluse par défaut.

2. Le vice doit être caché

Le vice doit être inconnu de l’acheteur au moment de la vente et ne doit pas avoir pu être décelé par l’acheteur, notamment lors de son inspection de l’immeuble avant l’achat.

3. Le vice doit avoir existé au moment de l'achat

En effet, pour qu’il y ait vice caché, le vice doit normalement avoir été existant au moment de la vente.

4. Le vice doit être grave

Le vice qui affecte le bien doit rendre celui-ci impropre à l’usage qui lui était destiné. Par exemple, un tuyau laissant les rats entrer dans la maison peut être considéré comme un vice caché[3].

5. L’acheteur doit avoir été « prudent et diligent » dans l’examen du bien avant de l’avoir acheté[4]

Avant d’acheter un immeuble, l’acheteur doit l’examiner adéquatement pour qu'il soit qualifié de prudent et diligent. À défaut, l'acheteur voulant poursuivre pour vices cachés pourrait se voir opposer une défense à cet effet et voir son recours rejeté.

La prudence et la diligence de l'acheteur impose un examen visuel attentif de l’immeuble. Si après cet examen de l’immeuble, des indices sérieux quant à l’existence de potentiels vices sont présents, l’acheteur doit pousser plus loin son examen du bien, avec l’aide d’un expert, le cas échéant.

Dans la décision récente Leclerc c. Succession de Diotte[5], le juge Cliche reprend les mots du juge Rochon dans l’affaire Lavoie c. Comtois[6] :

  • L'acheteur prudent et diligent d'un immeuble procède à un examen visuel attentif et complet du bâtiment. Il est à l'affût d'indice pouvant laisser soupçonner un vice. Si un doute sérieux se forme dans son esprit, il doit pousser plus loin sa recherche[7].

Pour ces raisons, l’acheteur va souvent faire inspecter l’immeuble par un expert adéquat, mais sa qualification de « prudent et diligent » sera analysée selon les faits particuliers de chaque dossier.

6. L’acheteur doit dénoncer le vice

Si l’acheteur découvre un vice caché et veut préserver ses recours, il doit dénoncer le vice au vendeur dans un délai raisonnable pour lui donner l'opportunité de constater et réparer les vices. Le défaut de dénoncer le vice au vendeur peut entrainer le rejet du recours en vice caché.

7. L’acheteur doit mettre en demeure le vendeur

Comme nous le rappelle les motifs de la décision Leclerc c. Succession de Diotte[8], l’acheteur doit mettre en demeure le vendeur d’effectuer les réparations à ses frais avant d’effectuer les réparations lui-même, sous réserve de certaines exceptions, notamment l’urgence de la situation ou si le vendeur a indiqué qu’il ne ferait aucun travail en lien avec les vices allégués (la « répudiation manifeste du vendeur »[9]).

8. Le demandeur a un délai de trois (3) ans pour intenter un recours en vices cachés

L’acheteur qui veut intenter un recours judiciaire contre le vendeur pour vices cachés doit le faire dans un délai de 3 ans de la découverte du vice[10].  Si le vice apparaît graduellement, ce délai court à partir du moment où il apparaît pour la première fois[11].

La jurisprudence a interprété la notion de la prescription en matière de vices cachés. La Cour d’appel du Québec, dans l’affaire récente Garand c. Fiducie Elena Tchouprounova[12], nous rappelle que le délai de trois ans court à compter du moment où le demandeur prend connaissance de la nature des défauts, des dommages et de leur gravité. Dans cette affaire, le délai de prescription courait à compter de la prise de connaissance d’un rapport d’expert identifiant la nature et la cause du problème et l’identification des mesures à prendre pour le corriger[13].

Finalement, afin de résumer le tout en matière de prescription, nous reprenons les mots du juge Prévost j.c.s. dans l’affaire Daunais c. Honda Canada inc.[14]:

  • [43] La jurisprudence reconnaît qu’en matière de vice caché, la prescription d’un droit d’action qui résulte d’un préjudice moral, corporel ou matériel qui se manifeste graduellement ou tardivement ne court qu’à compter du moment où la victime est consciente de la nature du dommage ou du défaut ainsi que de son degré relatif de magnitude[15].

9. Ce qui peut être notamment demandé par un acheteur aux prises avec un cas de vices cachés

  1. Diminution du prix de vente; ou
  2. La résolution de la vente; et
  3. Dommages-intérêts, s’il est prouvé que le vendeur connaissait ou ne pouvait ignorer les vices allégués[16].

10. Attention : chaque cas est un cas d’espèce

À titre de conseillers juridiques, nous répétons très souvent à nos clients que malgré l’existence de principes généraux en droit, chaque cas reste un cas d’espèce. En effet, en fonction des documents du client et des faits au dossier, différentes réponses en droit peuvent être applicables. Dans une potentielle situation de vices cachés, que vous soyez en demande ou en défense, il est particulièrement important de consulter rapidement un avocat afin qu’il puisse analyser la situation et vous conseiller sur les étapes à suivre afin d’éviter les faux pas.

Contactez-nous concernant votre cas.

* ATTENTION : Les informations de cet article sont d’ordre général et ne constituent en aucun cas un avis ou conseil juridique ni reflètent nécessairement l’état du droit de façon exhaustive. Les faits peuvent varier d’une situation à l’autre et potentiellement changer toute réponse d’ordre juridique. Une consultation avec un avocat concernant votre cas particulier est vivement recommandée.

[1]Art. 1716 C.c.Q.

[2]Art. 1732 C.c.Q.

[3]Dugas c.Naud, 2019 QCCQ 1500 (CanLII) : http://canlii.ca/t/hz8zk

[4]Art. 1726 al. 2 C.c.Q.

[5]2019 QCCQ 1614 : http://canlii.ca/t/hzdlh

[6]1999 CanLII 11787 (QC CS).

[7]Préc. note 5, par. 134 et suivants.

[8]Id., par. 124 et suivants.

[9]Id., par. 125.

[10]Art. 2925 C.c.Q.

[11]Art. 2926 C.c.Q.

[12]2018 QCCA 876 : http://canlii.ca/t/hsc5b

[13]Id., par 7.

[14]2019 QCCS 621 : http://canlii.ca/t/hxrr3

[15]Nos soulignements.

[16]Art. 1728 C.c.Q.

Rejoignez l'équipe de St-Aubin Avocats
Parlez avec un avocat

Obtenez les conseils et le soutien dont vous avez besoin pour faire valoir vos droits.

Prendre rendez-vous 514-735-3838
Auteur de cet article
M<sup>e</sup> Manuel St-Aubin
Me Manuel St-Aubin
Avocat chez St-Aubin avocats inc., associé principal.

St-Aubin avocats inc. est un cabinet spécialisé en litige civil et commercial, en immobilier et construction. Fort d’une équipe d’expérience en litige, St-Aubin avocats inc. cherche à donner l’heure juste à ses clients, tout en les menant vers les solutions les plus adaptées pour résoudre les problèmes rencontrés. L’approche pragmatique et efficace du cabinet nous permet de trouver des solutions alliant le droit aux affaires. Notre cabinet intervient principalement dans des litiges immobiliers, de construction et des litiges commerciaux (conflits entre actionnaires et conflits commerciaux).