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Le droit de résolution ou clause résolutoire dans l’acte de vente d’un immeuble : principes juridiques applicables

Le droit de résolution ou clause résolutoire dans l’acte de vente d’un immeuble : principes juridiques applicables

Écrit par Me Manuel St-Aubin
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Il arrivera parfois que dans le contrat de vente d’un immeuble, le vendeur se réserve le droit de résoudre la vente advenant certaines situations. Cette clause pourra être présente notamment lorsque qu'il subsiste un solde à payer sur le prix de vente de l'immeuble. Ce droit est appelé « droit de résolution » ou « clause résolutoire », et plusieurs formalités juridiques doivent être rencontrées pour le faire valoir.

Auteur : Me Manuel St-Aubin, avocat et associé chez St-Aubin avocats

Date de rédaction : 2023-12

Date de mise à jour : n/a

1. La clause résolutoire en matière immobilière

La clause résolutoire dans un contrat de vente d'un immeuble sera présente plus souvent lorsque qu'il reste un solde à payer par l'acheteur en vertu du contrat. Ainsi, le vendeur se garde une certaine garantie qu'il sera payé ou à défaut il pourra reprendre l'immeuble en vertu de la clause résolutoire.

Le Code civil du Québec (C.c.Q.), aux articles 1742 et 1743, encadre les droits résultant d’une clause résolutoire dans le contrat de vente d’un immeuble :

  • 1742. Le vendeur d’un bien immeuble ne peut demander la résolution de la vente, faute par l’acheteur d’exécuter l’une de ses obligations, que si le contrat contient une stipulation particulière à cet effet.
  • S’il est dans les conditions pour demander la résolution, il est tenu d’exercer son droit dans un délai de cinq ans à compter de la vente.

Ainsi, pour que le vendeur puisse demander la résolution de la vente de l’immeuble, il doit rencontrer les conditions préalables suivantes :

  1. Le contrat de vente contient une clause prévoyant la possibilité de résoudre la vente, la « clause résolutoire » ;
  2. L’acheteur doit être en défaut d’exécuter ses obligations en vertu du contrat de vente de l’immeuble ;
  3. Le droit de résolution doit être exercé par le vendeur dans un délai de 5 ans suivant la vente de l’immeuble.

Comme l’indique la Cour d’appel du Québec dans l’affaire Société de développement de Montréal c. 134893 Canada Inc., 2002 CanLII 41241 (QC CA), « la clause résolutoire s'apparente à ce que l'on appelait sous l'ancien droit une clause dite de dation en paiement » (par. 18).

Ce type de clause (dation en paiement) était souvent utilisée dans les actes hypothécaires et autres avant qu’elle ne devienne interdite en matière immobilière (art. 1801 C.c.Q.).

2. L’effet de la résolution de la vente

La résolution de la vente a pour effet juridique de :

  • Purger les charges (par exemple les hypothèques) que l’acheteur a pu inscrire sur l’immeuble après l’inscription du droit de résolution au registre foncier (art. 1743 al. 2 C.c.Q.) ;
  • Le contrat de vente est résolu et donc « réputé n’avoir jamais existé », et les parties au contrat doivent se restituer ce qu’ils ont reçu en vertu de la vente (art. 1606 C.c.Q.). Cela peut impliquer la restitution par le vendeur à l’acheteur de l’acompte versé pour la vente, et les versements en capital et en intérêts (art. 1699 et suivants C.c.Q.), sauf disposition contraire dans l’acte de vente.

Il est à noter que la Cour du Québec, dans l’affaire Plomberie Cataford inc. c. 9213-3081 Québec inc., 2015 QCCQ 12403, juge que la clause résolutoire a préséance sur l’hypothèque légale de la construction (par. 23).

3. Comment s’exerce le droit de résolution résultant de la clause résolutoire ?

L’article 1743 C.c.Q. encadre l’exercice de la clause résolutoire et indique les modalités applicables :

  • 1743. Le vendeur d’un bien immeuble qui veut se prévaloir d’une clause résolutoire doit mettre en demeure l’acheteur et, le cas échéant, tout acquéreur subséquent, de remédier au défaut dans les 60 jours qui suivent l’inscription de la mise en demeure au registre foncier; les règles relatives à la prise en paiement énoncées au livre Des priorités et des hypothèques, ainsi que les mesures préalables à l’exercice de ce droit s’appliquent à la résolution de la vente, compte tenu des adaptations nécessaires.
  • Le vendeur qui reprend le bien par suite de l’exercice d’une telle clause le reprend libre de toutes les charges dont l’acheteur a pu le grever après que le vendeur a inscrit ses droits.

Ainsi, le vendeur qui veut faire valoir son droit de résolution doit respecter les formalités suivantes[1] :

  • Il doit mettre en demeure l’acheteur ou tout acquéreur suivant l’acheteur de remédier au défaut dans les 60 jours de l’inscription de cette mise en demeure (ou « préavis ») au registre foncier ;
  • Il doit inscrire la mise en demeure/préavis au registre foncier ;
  • Il droit respecter les formalités prévues concernant la prise en paiement, ce qui implique l’obtention d’un délaissement forcé et donc la nécessité d’un jugement.

Ainsi, comme les règles de la prise en paiement l’indiquent, l’acheteur visé par l’exercice d’un droit de résolution de la vente pourrait demander dans certaines circonstances que le vendeur procède plutôt via une vente sous contrôle de justice de l’immeuble visé[2].

Il est à noter que les règles applicables pour exécuter le droit de résolution de la vente sont d’ordre public, donc il n’est pas possible de convenir ou de procéder autrement, tel que nous le rappelle la Cour supérieure du Québec dans l’affaire Forget c. Gareau, 2017 QCCS 5428 :

  • [72] L’article 1742 du Code civil du Québec du Québec étend ce régime particulier à toutes les obligations de l’acheteur. Ainsi, une vente immobilière ne peut être résolue pour inexécution des obligations de l’acheteur à moins qu’une stipulation particulière le prévoie clairement. Le délai pour exercer un tel recours est désormais de cinq ans et il s’agit d’un délai de déchéance qui commence à courir dès la conclusion de l’acte ayant transféré la propriété de l’immeuble[52]. Enfin, certaines formalités destinées à protéger l’acheteur sont prévues et doivent être respectées pour qu’il soit possible de prononcer la résolution de la vente[53]. Le régime prévu au Code civil du Québec concernant la résolution de la vente immobilière est d’ordre public[54].

4. À retenir 

Voici les grandes lignes de ce qui est à retenir concernant le droit de résolution en matière immobilière :

  • Ce droit doit être prévu dans l’acte de vente, souvent retrouvé sous la rubrique « clause résolutoire »;
  • Ce droit doit être inscrit au registre foncier;
  • Il doit être exercé par le vendeur dans les 5 ans de la vente;
  • Les formalités d’exercice de ce droit qui sont prévues au Code civil du Québec doivent être respectées.

AVIS : Les informations de cet article sont générales et ne constituent en aucun cas un avis ou conseil juridique ni ne reflètent nécessairement l’état du droit de façon exhaustive. Pour toute question d’ordre juridique adaptée à votre situation, nous vous conseillons de contacter un avocat.


[1] Voir notamment Réserve de bois Morin et Blanchette inc. c. Tremblay, 2012 QCCA 253, https://canlii.ca/t/fq1z5, par. 30 et suivants.

[2] 9214-3155 Québec inc. c. Seigneurie Masson inc., 2011 QCCS 5161, https://canlii.ca/t/fnb09, par. 23.

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Auteur de cet article
M<sup>e</sup> Manuel St-Aubin
Me Manuel St-Aubin
Avocat chez St-Aubin avocats inc., associé principal.

St-Aubin avocats inc. est un cabinet spécialisé en litige civil et commercial, en immobilier et construction. Fort d’une équipe d’expérience en litige, St-Aubin avocats inc. cherche à donner l’heure juste à ses clients, tout en les menant vers les solutions les plus adaptées pour résoudre les problèmes rencontrés. L’approche pragmatique et efficace du cabinet nous permet de trouver des solutions alliant le droit aux affaires. Notre cabinet intervient principalement dans des litiges immobiliers, de construction et des litiges commerciaux (conflits entre actionnaires et conflits commerciaux).