Le blogue reconnu comme la référence par la communauté juridique et d’affaires pour le droit immobilier
Cession de bail résidentiel : formalités et limites au refus de la cession par le propriétaire

Cession de bail résidentiel : formalités et limites au refus de la cession par le propriétaire

Écrit par Me Manuel St-Aubin
Imprimer cet article

Lorsqu'un locataire désire quitter son logement en cours de bail, il peut soit opter pour la sous-location ou la cession de son bail. Lorsqu'il choisit de céder son bail, le locataire doit en aviser le propriétaire (le « locateur ») et ce dernier peut accepter la cession ou la refuser dans certains cas. Cependant, le propriétaire ne peut pas dans tous les cas refuser la cession sans motif sérieux. Il existe donc des limites au droit de refus de la cession de bail. Explications en quelques points. 

Auteur : Manuel St-Aubin, avocat

ATTENTION : des modifications importantes ont été apportées aux règles applicables suivant l'adoption du Projet de loi n° 31, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière d’habitation, une mise à jour importante du présent article est à venir. Il se peut donc que le présent article ne reflète pas exactement les règles en vigueur.

Bref rappel de la notion de cession de bail résidentiel

Le locataire qui désire quitter son logement et ainsi se décharger des obligations découlant du bail doit céder son bail à un éventuel locataire (le « cessionnaire ») et indiquer au propriétaire à qui il cède ce bail. Le propriétaire doit ensuite consentir à la cession pour que celle-ci soit effective. Cette obligation est bien décrite à l'article 1870 du Code civil du Québec (C.c.Q.) :

  • 1870. Le locataire peut sous-louer tout ou partie du bien loué ou céder le bail. Il est alors tenu d’aviser le locateur de son intention, de lui indiquer le nom et l’adresse de la personne à qui il entend sous-louer le bien ou céder le bail et d’obtenir le consentement du locateur à la sous-location ou à la cession.

Pour quelle raison un propriétaire pourrait refuser la cession du bail d'un locataire ?

Le principe général est qu'en cas de cession de bail, le locateur a besoin d'un motif sérieux pour refuser la cession de bail intervenue. Voir à cet effet l’article 1871 du C.c.Q. :

1871. Le locateur ne peut refuser de consentir à la sous-location du bien ou à la cession du bail sans un motif sérieux.

Lorsqu’il refuse, le locateur est tenu d’indiquer au locataire, dans les 15 jours de la réception de l’avis, les motifs de son refus; s’il omet de le faire, il est réputé avoir consenti.

Mais en quoi consiste un « motif sérieux » pouvant donner le droit au locateur de refuser la cession de bail ?

Voici des cas de motifs sérieux pouvant permettre au locateur de refuser la cession de bail, motifs relatés dans l’affaire récente Boukas c. Kovacs[1]:

  • S’il y a absence de solvabilité du cessionnaire, « ce problème doit être réel, et non pas seulement appréhendé »[2];
  • « Si la conduite passée d’un locataire ne donne pas de garanties suffisantes que le bail sera respecté »[3].

Dans l’affaire précitée Boukas c. Kovacs, la locataire avait donné un avis au locateur de la cession de son bail avec le nom et l’adresse de la personne à qui elle cédait son bail. À cet avis était joint le contrat de cession de bail.

Cependant, le locateur a découvert que la cessionnaire avait eu plusieurs dossiers à la Régie du logement et qu’en plus ce n’était pas la cessionnaire qui allait résider dans le logement, mais sa mère, qui, après vérification, avait des problèmes de solvabilité.

De plus, la cessionnaire avait par la suite décidé de ne pas prendre le logement.

Voici les conclusions de l’affaire, où la responsabilité du locataire qui a tenté de céder son bail a été retenue pour plus de 10 000,00$ :

  • [38]   Dans la présente affaire, la preuve non contredite démontre qu’il y avait un problème de solvabilité et des éléments donnant à penser que le bail ne serait pas respecté. Et à ce chapitre, la locataire n’a même pas tenté de vérifier l’information et a adopté une attitude de fuite en indiquant aux locateurs de s’organiser avec la cessionnaire.
  • [39]   Elle a donc engagé sa responsabilité et causé un dommage important aux locateurs, lesquels, malgré leurs efforts, n’ont pu relouer le logement avant l’année suivante. Elle est donc tenue à la perte de loyer, les frais d‘annonce, d’énergie et de taxe d’eau. Ils ont aussi droit aux frais d’enquête de crédit pour la cessionnaire.

Conclusion

Il est important, autant pour le locateur que pour le locataire, de bien connaitre les formalités pour la cession d’un bail :

  • Donner avis au locateur de la cession en indiquant le nom et l’adresse de la personne à qui le locataire compte céder son bail;
  • Le locateur ne peut refuser la cession sauf pour motif sérieux et dispose d’un délai de 15 jours suivant la réception de l’avis de cession pour la refuser. À défaut de refuser dans ce délai, le locateur est réputé avoir consenti à la cession de bail.

Autant le locataire qui désire céder son bail doit suivre certaines formalités, que le propriétaire doit s’assurer d’avoir un motif sérieux pour refuser une cession de bail.

Pour des modèles concernant la cession de bail, vous pouvez consulter le site web de la Régie du logement.

Contactez-nous si vous souhaitez obtenir des services juridiques concernant votre cas particulier.


* ATTENTION : Les informations de cet article sont d’ordre général et ne constituent en aucun cas un avis ou conseil juridique ni reflètent nécessairement l’état du droit de façon exhaustive. Les faits peuvent varier d’une situation à l’autre et potentiellement changer toute réponse d’ordre juridique. Une consultation avec un avocat concernant votre cas particulier est vivement recommandée.

[1] 2018 QCRDL 36389.

[2] Préc., note 1, par. 36.

[3] Id., par. 37.

Rejoignez l'équipe de St-Aubin Avocats
Parlez avec un avocat

Obtenez les conseils et le soutien dont vous avez besoin pour faire valoir vos droits.

Prendre rendez-vous 514-735-3838
Auteur de cet article
M<sup>e</sup> Manuel St-Aubin
Me Manuel St-Aubin
Avocat chez St-Aubin avocats inc., associé principal.

St-Aubin avocats inc. est un cabinet spécialisé en litige civil et commercial, en immobilier et construction. Fort d’une équipe d’expérience en litige, St-Aubin avocats inc. cherche à donner l’heure juste à ses clients, tout en les menant vers les solutions les plus adaptées pour résoudre les problèmes rencontrés. L’approche pragmatique et efficace du cabinet nous permet de trouver des solutions alliant le droit aux affaires. Notre cabinet intervient principalement dans des litiges immobiliers, de construction et des litiges commerciaux (conflits entre actionnaires et conflits commerciaux).