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La résiliation du bail de logement pour non-paiement du loyer

La résiliation du bail de logement pour non-paiement du loyer

Écrit par Me Manuel St-Aubin
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En matière résidentielle, si le locataire fait défaut de payer son loyer ou le paie fréquemment en retard, le propriétaire (locateur) peut demander la résiliation du bail.

Auteur : Me Manuel St-Aubin, associé principal chez St-Aubin avocats inc.*

Date de rédaction : mai 2021

Dernière mise à jour : n/a

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La résiliation du bail par le locateur pour non-paiement de loyer

En matière résidentielle, l’article 1863 du Code civil du Québec (ci-après C.c.Q.) permet soit au locataire ou au locateur de demander la résiliation du bail en cas d’inexécution des obligations par l’une ou l’autre partie[1].

Si un locataire ne paie pas son loyer à temps ou qu’il ne paie pas son loyer, il n’exécute ainsi pas son obligation, ouvrant donc la porte à une demande du locateur pour résiliation du bail agencée d’une demande d’expulsion[2].

En effet, le locataire est tenu de payer le loyer convenu pendant la durée du bail, tel que l’indique l’article 1855 C.c.Q.

Selon l’article 1971 C.c.Q., le locateur peut demander la résiliation du bail dans les cas suivants :

  1. Le locataire est en retard de plus de 3 semaines dans le paiement de son loyer ; OU
  2. Le locataire retarde fréquemment le paiement du loyer et que le locateur en subit un préjudice.

Le locataire est en retard de plus de 3 semaines dans le paiement de son loyer

Si le locataire est en retard de plus de 3 semaines dans le paiement de son loyer, le locateur doit notamment démontrer que le loyer est dû depuis plus de 3 semaines et qu’il n’a toujours pas reçu de paiement pour obtenir la résiliation du bail.

Il est important de préciser que le locataire poursuivi pour ce motif peut faire échec à la demande en résiliation s’il paye avant le jugement, le loyer dû et les frais et intérêts additionnels[3].

Le locataire retarde fréquemment le paiement du loyer et le locateur en subit un préjudice

Pour demander la résiliation du bail dans ce cas de figure, il faut notamment démontrer ceci :

  • Le locataire retarde fréquemment le paiement du loyer ;
  • Ces retards de paiement causent un préjudice au locateur ;
  • Le préjudice que subit le locateur dû à ces retards de paiement est sérieux[4].

Le préjudice sérieux :

Le préjudice sérieux ici « ne se limite pas à une perte ou une menace pécuniaire »[5].

Dans la décision Allaire c. Bourdeau, 2017 QCCQ 4963, la Cour du Québec nous donne des exemples de ce qui peut constituer un préjudice sérieux autre que financier dans cette situation [6] :

  • « alourdissement anormal de la gestion de l'immeuble, multiplicité des démarches auprès du locataire ou du tribunal pour percevoir les loyers ou coûts supplémentaires ;
  • soucis et tracas causés par l’entêtement du locataire à retenir son loyer, temps et énergie consacrés pour les vacations devant la Régie du logement, notes comptables et suivi des démarches effectuées ;
  • soucis et tracas causés par l’entêtement du locataire à retenir son loyer, temps et énergie consacrés pour les vacations devant la Régie du logement, notes comptables et suivi des démarches effectuées ;
  • démarches constantes et multipliées pour se faire payer, demandes répétées à la Régie du logement afin d'obtenir le paiement du loyer, gestion de trois décisions de la Régie du logement ;
  • nombreux avis envoyés au locataire pour lui rappeler ses retards, remise du dossier à ses avocats pour récupérer le loyer dû et frais ainsi engagés ;
  • multiplication des démarches pour obtenir les loyers dus et paiement de frais bancaires pour de nombreux chèques retournés ;
  • impossibilité de disposer des sommes dues, procédures de recouvrement et pertes d’intérêts sur l’argent non reçu »[7].

Un simple inconvénient dû au retard de paiement du loyer ne sera pas nécessairement considéré comme étant un préjudice sérieux. Afin d’obtenir la résiliation du bail, le locateur devra donc démontrer que le retard fréquent du paiement des loyers le met dans une situation particulièrement problématique.

Il est important de préciser que même si le locateur parvient à démontrer qu’il subit un préjudice sérieux à cause des retards fréquents du locataire dans le paiement du loyer, le Tribunal peut décider de surseoir à la demande en résiliation de loyer et émettre une ordonnance prévoyant que le locataire effectue ses paiements à temps et régulièrement[8]. Par la suite, si le locataire ne respecte pas cette ordonnance, alors le bail pourrait être résilié à la demande du locateur[9].

Il est à noter que le locataire ici ne peut faire échec à la résiliation du bail pour cause de retard fréquent dans le paiement du loyer comme c’est le cas s’il est en retard de plus de trois semaines dans le paiement du loyer[10].

En résumé

Pour obtenir la résiliation du bail résidentiel pour non-paiement du loyer, le locateur peut faire valoir deux motifs :

  1. Le locataire est en retard de plus de 3 semaines dans le paiement de son loyer ; OU
  2. Le locataire retarde fréquemment le paiement du loyer et que le locateur en subit un préjudice.

À titre d’exemple, il arrivera que les ordonnances du Tribunal soient agencées ainsi si le locateur demande la résiliation pour ces deux motifs :

« POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[15] RÉSILIE le bail et ORDONNE l'expulsion de la locataire et de tous les occupants du logement;

[16] ORDONNE l'exécution provisoire, malgré l'appel, de l'ordonnance d'expulsion à compter du 11e jour de sa date;

[17] Advenant que la résiliation ait été empêchée conformément à l'article 1883 C.c.Q., ORDONNE à la locataire de payer son loyer le 1er de chaque mois à compter du juin 2019, et ce, pour une période de 24 mois, le cas échéant;

[18] CONDAMNE la locataire à payer au locateur 6 600 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q., à compter du présent jugement, plus les frais judiciaires de 75 $ et de signification prévus au Tarif de 9 $ »[11].

AVIS : Les informations de cet article sont générales et ne constituent en aucun cas un avis ou conseil juridique ni ne reflètent nécessairement l’état du droit de façon exhaustive. Pour toute question d’ordre juridique adaptée à votre situation, nous vous conseillons de consulter un avocat.

*Article écrit en collaboration avec Ernst Élizée, stagiaire en droit chez St-Aubin avocats inc.


[1] Art. 1863 al. 1 C.c.Q.

[2] Art. 1889 C.c.Q.

[3] Art. 1883 C.c.Q.

[4] 3 Critères cumulatifs à rencontrer selon Allaire c. Bourdeau, 2017 QCCQ 4963, par. 54.

[5] Allaire c. Bourdeau, 2017 QCCQ 4963, par. 57.

[6] Id., par. 57-58.

[7] Id., par. 58.

[8] Art. 1973 C.c.Q.

[9] Art. 1973 C.c.Q. et Entreprises Tarzan inc. c. Gabriel, 2020 QCTAL 6787 par. 31 à 33. 

[10] Tel que prévu par l’article 1883 C.c.Q.

[11] Tiré des conclusions dans Ramotar c. Harihar, 2019 QCRDL 13130.

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Auteur de cet article
M<sup>e</sup> Manuel St-Aubin
Me Manuel St-Aubin
Avocat chez St-Aubin avocats inc., associé principal.

St-Aubin avocats inc. est un cabinet spécialisé en litige civil et commercial, en immobilier et construction. Fort d’une équipe d’expérience en litige, St-Aubin avocats inc. cherche à donner l’heure juste à ses clients, tout en les menant vers les solutions les plus adaptées pour résoudre les problèmes rencontrés. L’approche pragmatique et efficace du cabinet nous permet de trouver des solutions alliant le droit aux affaires. Notre cabinet intervient principalement dans des litiges immobiliers, de construction et des litiges commerciaux (conflits entre actionnaires et conflits commerciaux).