
La déclaration de copropriété et ses modifications : conditions juridiques de validité
- A. La déclaration de copropriété : la clé de voûte de la copropriété divise
- B. Le contenu de la déclaration de copropriété et formalités obligatoires
- 1. Qu’est-ce que l’acte constitutif de copropriété?
- 2. Qu’est-ce que le règlement de l’immeuble?
- 3. Qu’est-ce que l’état descriptif des fractions?
- C. Les modifications à la déclaration de copropriété
- D. Une modification tacite ou verbale de la déclaration de copropriété est-elle possible ?
- E. Conclusion
Le contenu de la déclaration de copropriété est l’élément de référence qui régit les relations entre les copropriétaires, le syndicat de copropriété, et l’assemblée des copropriétaires. En matière de copropriété, c’est le premier document qui doit être pris en considération. Plusieurs questions peuvent se poser : quelles sont les obligations à rencontrer pour s’assurer de la validité de la déclaration, qu’en est-il des modifications, des formalités à respecter?
Par : Me Manuel St-Aubin, avocat chez St-Aubin avocats
Date de rédaction : 2025-08
Dernière mise à jour : n/a
A. La déclaration de copropriété : la clé de voûte de la copropriété divise
La déclaration de copropriété est l’élément fondamental dans l’établissement de la copropriété divise. En effet, c’est la publication de la déclaration de copropriété au registre foncier qui établit la copropriété divise (art. 1038 C.c.Q.).
À compter de la publication de la déclaration, le syndicat de copropriété est également constitué (art. 1039 C.c.Q.).
C’est principalement la déclaration de copropriété qui régit l'ensemble des relations entre les copropriétaires. Ainsi, c’est le premier document sur lequel se baser lorsque des questions se posent.
Attention cependant de ne pas confondre la copropriété divise de la copropriété indivise, car les règles ne sont pas les mêmes.
- Pour en savoir plus concernant l’indivision, consultez notre article Indivision et immeuble : comment y mettre fin ?
B. Le contenu de la déclaration de copropriété et formalités obligatoires
Outre le contenu obligatoire que doit comprendre la déclaration de copropriété pour être valide, des exigences de forme sont imposées par le Code civil du Québec. Ainsi, une déclaration de copropriété doit obligatoirement :
- Être notarié en minute, de même des modifications à l’acte constitutif de copropriété ou à l’état descriptif des fractions (art. 1059 al. 1 C.c.Q.);
- Être signée par tous les propriétaires de l’immeuble, par l’emphytéote, le superficiaire, et les créanciers hypothécaires le cas échéant (art. 1059 al. 2 C.c.Q.) - à noter que les modifications de la déclaration de copropriété ne sont signées que par le syndicat de copropriété (art. 1059 al. 2 C.c.Q.);
- Être inscrite au registre foncier, en français, sous les numéros d’immatriculation des parties communes et des parties privatives (art. 1060 al. 1 C.c.Q.).
À compter de l’inscription de la déclaration de copropriété au registre foncier, cette dernière « lie les copropriétaires, leurs ayants cause et les personnes qui l’ont signée et produit ses effets envers eux » (art. 1062 C.c.Q.).
Quant au contenu du la déclaration de copropriété, le Code civil du Québec exige à l’article 1052 qu’une déclaration de copropriété contienne les trois éléments suivants :
- L’acte constitutif de copropriété;
- Le règlement de l’immeuble;
- L’état descriptif des fractions.
Ces éléments sont définis ci-dessous et comportent leurs caractéristiques propres.
1. Qu’est-ce que l’acte constitutif de copropriété?
Tel que définit à l’article 1053 C.c.Q., l’acte constitutif de copropriété contient les informations suivantes :
- Il définit la destination de l’immeuble, des parties privatives et des parties communes (art. 1053 al. 1 C.c.Q.);
- Il détermine la valeur relative de chaque fraction (partie privative), indique la méthode suivie pour l’établir, détermine la quote-part des charges communes que chaque unité privative supporte et le nombre de voix qui lui sont attribuées (art. 1053 al. 2 C.c.Q.);
- Il précise les pouvoirs et devoirs autant du conseil d’administration du syndicat de copropriété que de l’assemblée des copropriétaires (art. 1053 al. 2 C.c.Q.);
- Il prévoit toute autre convention relative à l’immeuble ou à ses parties privatives ou communes, y compris toute clause pénale en cas de contravention à la déclaration de copropriété (art. 1053 al. 2 C.c.Q.).
2. Qu’est-ce que le règlement de l’immeuble?
Le règlement de l’immeuble établit quant à lui la logistique du fonctionnement de la copropriété. Selon l’article 1054 du C.c.Q., le règlement contient notamment ce qui suit :
- Les règles relatives à la jouissance, l’usage et l’entretien des parties communes et privatives;
- Les règles de fonctionnement et d’administration de la copropriété;
- La procédure de cotisation et de recouvrement des contributions aux charges communes.
Le règlement de l’immeuble étant important à faire respecter, il est opposable au locataire ou à l’occupant d’une partie privative lorsqu’un exemplaire lui est remis par le copropriétaire ou par le syndicat de copropriété (art. 1057 C.c.Q.). Ainsi, un locataire ou occupant pourrait possiblement se voir imposer des sanctions et pénalités en cas de contravention au règlement de l’immeuble (Hu c. Ettazgui, 2022 QCTAL 30968), et même se voir résilier son bail à la demande du syndicat (art. 1079 C.c.Q.).
3. Qu’est-ce que l’état descriptif des fractions?
Selon l’article 1055 C.c.Q., l’état descriptif des fractions contient ce qui suit :
- La désignation cadastrale des parties communes et privatives de la copropriété;
- La description des droits réels (par exemple les servitudes) grevant l’immeuble et/ou les droits réels existant en faveur de l’immeuble, sauf les hypothèques et sûretés additionnelles qui se greffent à l’immeuble. Ainsi, à titre d’exemple, lorsqu’une hypothèque est inscrite sur une unité privative et sur les parties communes, il n’y a pas lieu de l’ajouter dans l’état descriptif des fractions.
C. Les modifications à la déclaration de copropriété
Les modifications à la déclaration de copropriété doivent respecter certaines formalités pour être valides. Ces formalités ne sont pas les mêmes selon le contenu des modifications.
Toute modification à la déclaration de copropriété (incluant notamment aussi au règlement de l’immeuble) doit être signée par le syndicat de copropriété (art. 1059 al. 2 C.c.Q.).
Lorsque les modifications touchent l’acte constitutif de copropriété ou l’état descriptif des fractions, les formalités à rencontrer sont les suivantes :
- Un vote représentant au moins les trois quarts (¾) des voix des copropriétaires présents ou représentés à l’assemblée des copropriétaires doit avoir lieu pour approuver les modifications (art. 1097 par. 4 C.c.Q.). S’il y a changement de la destination de l’immeuble ou une modification permettant la détention d’une fraction par plusieurs personnes ayant un droit de jouissance périodique et successif, un vote d’au moins la majorité de trois quarts (¾) des copropriétaires représentant 90% des voix de tous les copropriétaires est nécessaire (art. 1098 C.c.Q.) ;
- Les modifications doivent être notariées (art. 1059 al. 1 C.c.Q.);
- Elles doivent être signées par le syndicat de copropriété (art. 1059 al. 2 C.c.Q.);
- Elles doivent être présentées exclusivement en français pour inscription au registre foncier et inscrites uniquement sous le numéro d’immatriculation des parties communes (art. 1060 al. 1 C.c.Q.).
La Cour supérieure du Québec, dans l’affaire Mammis c. Fang, 2016 QCCS 2601, précise clairement que les modifications apportées à l’acte constitutif de la copropriété doivent être notariées et publiées au registre foncier, à défaut que quoi ces modifications ne lient pas les copropriétaires (par. 66). La Cour d’appel a la même position dans l’affaire Brown c. Syndicat des copropriétaires des Manoirs de Terrebonne, 2022 QCCA 1520 (par. 29 et 30).
Finalement, lorsqu’une modification est apportée au règlement de l’immeuble, les formalités sont moindres :
- Un vote de la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés à l’assemblée des copropriétaires doit avoir lieu (art. 1096 C.c.Q.);
- Les modifications doivent être expresses, contenues dans un procès-verbal ou une résolution écrite des copropriétaires (art. 1060 al. 1 C.c.Q.);
- Les modifications doivent être apportées exclusivement en français (art. 1060 al. 1 C.c.Q.);
- Les modifications doivent être déposées au registre tenu par le syndicat en vertu de l’article 1070 C.c.Q. (art. 1060 al. 1 C.c.Q.).
D. Une modification tacite ou verbale de la déclaration de copropriété est-elle possible ?
Au fil du temps, la question est souvent revenue devant les tribunaux. La jurisprudence avait par le passé laissé entendre que la modification tacite (ou verbale) du règlement de l’immeuble pouvait être possible.
Cependant, avec les changements législatifs apportés au fil du temps en copropriété, le Code civil du Québec exclut maintenant la possibilité de modifier tacitement la déclaration de copropriété, notamment avec les modifications apportées à l’article 1060 C.c.Q.
De plus, comme le confirme la Cour d’appel du Québec dans l’affaire Syndicat des copropriétaires du 310, 320, 330 et 340 Boulevard Industriel c. 9322-0549 Québec inc., 2023 QCCA 892, il n’est plus possible d’invoquer une modification tacite du règlement de l’immeuble qui aurait été faite avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, car ces dernières trouvent effet rétroactif (par. 32). Il ne serait donc plus possible d'invoquer l'ancienne loi pour réclamer l'application de modifications tacites au règlement de l'immeuble.
E. Conclusion
Les règles applicables en copropriété divise sont strictement définies, notamment en ce qui concerne la déclaration de copropriété. À défaut de suivre les règles applicables, des problèmes juridiques peuvent se développer.
De plus, plusieurs anciennes déclarations de copropriété peuvent comporter des dispositions aujourd’hui inapplicables, voire illégales. Il convient donc de s’assurer que la déclaration de copropriété est le plus conforme que possible au droit en vigueur, ce qui peut impliquer certaines modifications et refontes.
AVIS : Les informations de cet article sont générales et ne constituent en aucun cas un avis ou conseil juridique ni ne reflètent nécessairement l’état du droit de façon exhaustive. Pour toute question d’ordre juridique adaptée à votre situation, nous vous conseillons de nous contacter pour parler à un avocat.
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